Divorce (Maupassant)
Résumé très court
Rouen, fin du XIXe siècle. Un homme se présenta chez Maître Bontran, célèbre avocat spécialisé dans les divorces, pour lui demander de plaider sa cause.
L'ancien notaire raconta son histoire. Vivant modestement à Rouen, il avait lu une annonce matrimoniale promettant une dot de deux millions cinq cent mille francs. Obsédé par cette somme qui mettrait fin à ses soucis financiers, il écrivit au nom d'un client imaginaire.
Après un dîner arrosé de champagne, ils succombèrent à la tentation. Pour réparer sa faute, il l'épousa. Six mois passèrent paisiblement, puis il remarqua qu'elle faisait des sorties mystérieuses. Il la suivit jusqu'à la gare où elle retrouvait des enfants.
Elle me confessa, dans un déluge de larmes, qu'elle en avait quatre... Et c'était là l'origine de sa fortune. – Les quatre pères !… Elle avait amassé sa dot.
Résumé détaillé
La division en chapitres est éditoriale.
Lidée dangereuse et lannonce matrimoniale
Un ancien notaire de trente-sept ans se présenta dans le cabinet de Maître Bontran pour demander le divorce.
L'homme expliqua que son cas était particulier et commença par raconter son histoire. Il développa sa théorie sur les idées dangereuses.
Croyez-vous que certaines idées soient aussi dangereuses pour certains esprits que le poison pour le corps ? C'est une sorte de phylloxera des âmes.
Vivant modestement à Rouen, il lisait attentivement les annonces matrimoniales. Un jour, il découvrit une annonce d'une demoiselle offrant deux millions cinq cent mille francs. Lors d'un dîner avec ses amis, il mentionna cette annonce en plaisantant. L'un d'eux lui suggéra de répondre lui-même à l'annonce.
La rencontre avec Mlle Chantefrise
De retour chez lui dans sa chambre lugubre, l'idée de cette fortune l'obsédait. Il ne cessait de penser aux deux millions cinq cent mille francs.
Pendant quinze jours cette idée me hanta, m'obséda, me tortura... chacune de ces petites souffrances me faisait songer aussitôt à la demoiselle.
Il finit par écrire à l'annonce, se présentant comme notaire agissant pour un client. Cinq jours plus tard, Mlle Chantefrise se présenta à son étude.
C'était une femme d'environ trente ans, un peu forte et brune, qui semblait embarrassée. Elle confirma posséder la fortune annoncée et accepta de rencontrer le prétendu client. Le notaire prétexta que son client était parti en Angleterre et lui proposa de dîner avec lui en attendant. Elle accepta après quelque hésitation.
La cour et le mariage
Le soir même, il l'emmena dîner dans un restaurant. Elle lui raconta son histoire : fille naturelle d'un gentilhomme et d'une grande dame, élevée chez des paysans, elle avait hérité de grosses sommes de ses parents. Elle parlait de sa fortune avec compétence, ce qui rassura le notaire. Après avoir bu du champagne, il devint galant et elle marivauda avec grâce.
Pour se calmer et éviter d'être trop entreprenant, il lui demanda de voir les preuves de sa dot. Elle les avait apportées à l'hôtel. Ils s'y rendirent ensemble, et elle lui montra tous ses titres. Rassuré sur la réalité de la fortune, il fut pris d'un violent désir de l'embrasser.
Je succombai... ou plutôt... non... elle succomba. Ah ! monsieur, j'en fis une tête, après cela... et elle donc ! Elle pleurait comme une fontaine.
Le lendemain, rongé par les remords mais attiré par la dot, il se présenta à son hôtel et lui demanda sa main. Elle accepta, et ils se marièrent. Pendant six mois, tout alla bien. Il avait cédé son étude et vivait en rentier, sans avoir le moindre reproche à adresser à sa femme.
La découverte des sorties mystérieuses
Cependant, il remarqua que sa femme faisait de longues sorties à jours fixes : une semaine le mardi, l'autre le vendredi. Soupçonnant une infidélité, il décida de la suivre. Déguisé en charbonnier, il la pista jusqu'à la gare de la rive gauche. Il s'attendait à voir arriver un amant, mais découvrit tout autre chose.
Sa femme accueillit une petite fille de trois ans accompagnée d'une paysanne, puis un autre enfant plus jeune porté par une autre campagnarde. Elle les emmena tous vers la promenade du Cours-la-Reine. Le notaire rentra chez lui, effaré et ne comprenant pas la situation.
La vérité sur les enfants et le conseil de lavocat
Quand elle revint pour dîner, il l'interrogea brutalement sur ces enfants. Elle s'évanouit, puis avoua dans un déluge de larmes qu'elle en avait quatre : deux filles pour le mardi et deux garçons pour le vendredi. Elle révéla que c'était là l'origine de sa fortune - les quatre pères différents lui avaient permis d'amasser sa dot.
Ayant terminé son récit, l'ancien notaire demanda conseil à l'avocat sur la conduite à tenir dans cette situation embarrassante.
L'avocat répondit avec gravité : — Reconnaître vos enfants, monsieur.
Cette réponse inattendue clôtura l'entretien, laissant le client face à ses responsabilités paternelles plutôt qu'à ses griefs matrimoniaux.