Le donneur d'eau bénite (Maupassant)
Résumé très court
France, XIXe siècle. Un charron et sa femme vivaient heureux avec leur fils unique Jean. À cinq ans, l'enfant disparut, enlevé par des saltimbanques.
Les parents désespérés vendirent tout pour chercher leur fils. Devenus mendiants, ils finirent à Paris où le charron devint donneur d'eau bénite dans une église, espérant toujours retrouver Jean.
Quinze ans plus tard, un homme élégant entra dans l'église avec sa fiancée. Le vieux charron crut le reconnaître.
Alors le vieux, dont la main tremblait tellement qu'elle faisait par terre une pluie d'eau bénite, s'écria : « Jean ? » L'homme s'arrêta, le regardant.
Résumé détaillé
La division en chapitres est éditoriale.
Lenfance de Jean et sa disparition mystérieuse
Pierre, un charron, vivait avec sa femme Jeanne dans une petite maison près d'une grande route, à l'entrée d'un village. Après avoir épousé la fille d'un fermier du pays, il s'était établi artisan. Tous deux travaillaient beaucoup et amassèrent une petite fortune. Leur seul chagrin était de ne pas avoir d'enfants.
Enfin un fils leur vint, qu'ils appelèrent Jean. Ils le chérissaient tellement qu'ils ne pouvaient rester une heure sans le regarder. Quand Jean eut cinq ans, des saltimbanques passèrent dans le pays et établirent une baraque sur la place de la Mairie. L'enfant, attiré par le spectacle, s'échappa de la maison. Son père le retrouva au milieu des chèvres savantes et des chiens dressés, riant aux éclats sur les genoux d'un vieux paillasse.
La quête désespérée des parents et leur descente dans la pauvreté
Trois jours après... le charron et sa femme s'aperçurent que leur fils n'était plus dans la maison. Ils le cherchèrent dans leur jardin, et comme ils ne le trouvaient pas...
Le père sortit sur la route et cria de toute sa force le nom de son fils. La nuit tombait, l'horizon s'emplissait d'une vapeur brune. Trois grands sapins semblaient pleurer. Aucune voix ne répondit, mais il y avait dans l'air comme des gémissements indistincts.
Il courut ainsi jusqu'au jour, emplissant les ténèbres de ses cris, épouvantant les bêtes rôdeuses, ravagé par une angoisse terrible et se croyant fou par moments.
Sa femme, assise sur la pierre de sa porte, sanglota jusqu'au matin. On ne retrouva pas leur fils. Alors ils vieillirent rapidement dans une tristesse inconsolable. Enfin, ils vendirent leur maison et partirent pour chercher eux-mêmes. Ils questionnèrent bergers, marchands et paysans, mais personne ne savait rien. Bientôt ils n'eurent plus d'argent et furent obligés de mendier sur les routes.
Larrivée à Paris et le métier de donneur deau bénite
Un hôtelier leur conseilla d'aller à Paris pour retrouver leur fils. Lorsqu'ils entrèrent dans la grande ville, ils furent épouvantés par son immensité et par les multitudes qui passaient. Ils comprirent cependant qu'il devait être au milieu de tous ces hommes, mais ils ne savaient comment s'y prendre pour le chercher. Il y avait alors quinze ans qu'ils ne l'avaient vu.
Chaque dimanche ils passaient leur journée à la porte des églises, regardant entrer et sortir les foules et cherchant sur les figures quelque ressemblance lointaine.
Au seuil d'une des églises où ils revenaient le plus souvent, un vieux donneur d'eau bénite était devenu leur ami. Son histoire était aussi fort triste, et la commisération qu'ils avaient pour lui fit naître entre eux une grande amitié. Ils finirent par habiter ensemble tous les trois dans un pauvre taudis.
Un hiver très dur vint. Le pauvre porteur de goupillon mourut, et le curé de la paroisse désigna pour le remplacer le charron dont il avait appris les malheurs. Alors Pierre vint chaque matin s'asseoir au même endroit, sur la même chaise, regardant fixement tous les hommes qu'il voyait entrer. Il connaissait à présent tous ceux qui venaient aux offices, leurs heures, leurs habitudes.
La reconnaissance miraculeuse et les retrouvailles
Un jour, deux dames vinrent à l'église, l'une vieille et l'autre jeune. Derrière elles se présenta un homme qui les suivit. Cette ressemblance vague importunait tellement le vieux donneur d'eau bénite qu'il fit venir sa femme pour aider sa mémoire affaiblie. Un soir, quand les trois personnes redescendaient, l'homme touchait le goupillon du doigt. Alors le vieux, dont la main tremblait, s'écria : « Jean ? »
L'homme s'arrêta, le regardant. Illuminé par un souvenir d'enfance, il répondit : « Papa Pierre, maman Jeanne ! » Il tomba, la figure sur les genoux du vieux, et il pleurait. Les deux dames pleuraient aussi, comprenant qu'un grand bonheur était arrivé. Jean leur raconta son histoire : les saltimbanques l'avaient enlevé, puis une vieille dame l'avait recueilli, éduqué et lui avait laissé sa fortune. Maintenant, il allait se marier.
Ils veillèrent fort tard ce soir-là, n'osant pas se coucher, de crainte que le bonheur qui les fuyait depuis si longtemps ne les abandonnât de nouveau pendant leur sommeil. Mais ils avaient usé la ténacité du malheur, car ils furent heureux jusqu'à leur mort.